Serge Noukoué, directeur de la Nollywood Week, nous éclaire sur le phénomène cinématographique en provenance des studios nigérians.
Comment se porte le cinéma nigérian ?
Il a le vent en poupe. Il intéresse désormais la planète entière, comme l’indiquent les récentes sélections de films nigérians à Tribeca, Sundance et Toronto. Le Nigeria, c’est entre 1 500 et 2 000 films par an, ce qui place le pays au deuxième rang mondial en matière de production. Les films de la nouvelle ère de Nollywood, ou New Nollywood, sont en général de bien meilleure qualité que les films du début des années 2000. Nollywood, c’est une machine à chiffres… La production cinématographique et musicale a généré 4 milliards de dollars, soit 2 % du PIB du Nigeria. Nollywood est aussi le deuxième employeur du pays après l’agriculture. Cependant, tout n’est pas rose et les difficultés existent, notamment pour la distribution et le financement. A cause de la hausse des coûts, les cinéastes nigérians tournent de plus en plus au Ghana.
Quels sont les thèmes et les genres récurrents ?
L’amour, la trahison, la vengeance sont les thèmes sur lesquels s’est basée cette industrie, puis, au fil du temps, le spectre s’est élargi. Il y a aujourd’hui une diversité de thématiques et de genres qui n’existaient pas il y a dix ans. Ceci est dû à un public qui gagne en maturité et qui devient beaucoup plus exigeant. Les bricolages du début ne sont plus permis. Même s’il faut préciser qu’il y a une certaine segmentation des publics, et donc une multiplicité de Nollywood. Cela étant dit, les genres les plus populaires dans les salles restent les comédies et les comédies romantiques.
“Bollywood a bel et bien influencé le cinéma nigérian”
Quelles influences Nollywood a-t-il subi ?
On sent de multiples influences, américaines mais aussi latino-américaines et asiatiques. Aujourd’hui, Nollywood se fraie son propre chemin et est à son tour copié par d’autres pays. Bollywood a bel et bien influencé le cinéma nigérian, mais surtout celui du nord du pays. Un cinéma avec ses propres codes et très différent de celui qui se fait à Lagos et à l’est, qui sont les centres névralgiques de ce qu’on appelle communément Nollywood.
Le cinéma nigérian s’exporte-t-il ?
Oui, et c’est sa force. Les Africains du continent s’identifient de manière générale et se reconnaissent dans les histoires racontées par Nollywood. Ensuite, l’Europe est un bassin important pour la diaspora nigériane et africaine. Il s’exporte notamment grâce à Internet et au streaming, par le biais de géants locaux (Iroko TV) et internationaux (Netflix).
Quels sont les trois films du festival à voir absolument ?
Sylvia, de Daniel Oriahi (le 5 mai, 20h), une histoire d’amour et de fidélité, qui explore le surnaturel comme peu de films de Nollywood le font. The Delivery Boy, d’Adekunle Adejuyigbe (le 5 mai, 22h30), portrait d’un jeune devenu terroriste, un film qui témoigne de l’impact laissé par des organisations telles que Boko Haram sur la société nigériane. The Housewife, de Jay Franklin Jituboh (le 6 mai, 15h45), un court-métrage qui veut montrer la réalité d’un couple marié et les responsabilités qui pèsent sur les femmes. Un bel écho au mouvement Metoo.