Dans une interview accordée à notre rédaction, l’érudit du ballon rond du haut de sa posture de manager international, de consultant, d’analyste, de dirigeant de club et de bien d’autres valeurs qui lui siéent dans cette discipline, revient sur son riche parcours suivi de ses brillantes réalisations ainsi que de son élogieuse expérience dans le domaine. L’homme inspire la volonté, le travail, le mérite et la réussite.
Ibrahim Njoya vous êtes un acteur majeur du football depuis plusieurs années. Votre notoriété va au-delà des frontières. Peut-on avoir une idée de vos débuts dans le métier et ce qui vous a motivé à emprunter cette voie ?
J’ai démarré ma carrière sur le plan national en mettant en relation les jeunes talents avec les clubs locaux intéressés à la conclusion d’un contrat sportif. Cette intermédiation a facilité et renforcé mes contacts avec les sportifs et les dirigeants de clubs. J’ai pu être ainsi pleinement en immersion dans ce milieu, ce qui m’a encouragé à me professionnaliser en préparant la licence d’agent de joueur que j’ai obtenue à la Fédération Camerounaise de Football (FECAFOOT). En parallèle de l’exercice de mon métier d’agent, j’ai dirigé le centre de formation New-Bell Sport Academy (NSA) en qualité de 1er vice –président et je suis actuellement président du conseil d’administration du centre de formation Vision Espoir Academy (VEA). Dans le cadre de mes fonctions administratives au sein de ces sociétés, j’ai emmené les jeunes de la NSA en Norvège pour un tournoi sportif en 2010 et ceux de la VEA au tournoi de Montrichard en France en 2011. Toutes ces expériences ont renforcé mes compétences et conduit à porter mes activités de manager au niveau international d’abord par le biais d’une formation à l’école des métiers du foot, où j’ai obtenu un diplôme en recrutement de footballeurs professionnels et ensuite par une certification en marketing sportif et sponsoring. Quant à ma motivation elle découle de ma passion pour le sport et particulièrement pour le foot que je pratique en tant qu’amateur depuis mon adolescence. En outre, mon aisance à évoluer dans ce milieu et à comprendre ses codes et ses règles ont également été des éléments favorisants. Enfin je dois avouer la joie qui me remplit dans ce process d’accompagnement. En effet, c’est tellement gratifiant de tenir la main d’un jeune talent et d’avancer ensemble jusqu’à sa réussite professionnelle.
Le secteur est fortement concurrentiel et exige beaucoup de stratégies et de carnets d’adresses. Quels moyens employez –vous pour imprimer vos marques ?
La concurrence pour moi est un facteur positif car elle déculpe la volonté de réussir. D’autre part, j’œuvre pour des relations cordiales avec tous mes collègues et pour certains nous nous entraidons dans ce métier. Je dirai que tout travail exécuté avec soin et conscience reçoit sa récompense. Le bouche à oreille faisant son chemin, la concurrence n’est pas un obstacle à mon expansion dans ce métier. Concernant le carnet d’adresses, il se construit avec le temps grâce au travail, la compétence et la loyauté. J’ai de très bonnes relations avec plusieurs dirigeants de clubs et joueurs professionnels. Par ailleurs, je suis régulièrement invité sur les plateaux télé en tant que consultant sportif. Voilà ce qui forge et étend mon réseau de contacts.
Peut-on avoir aujourd’hui le bilan de votre parcours de manager relativement à vos faits d’arme?
Mon bilan est plutôt positif au regard du nombre de joueurs qui me font confiance et pour lesquels je travaille aujourd’hui.
Parvenu à ce haut niveau de vos réalisations on aimerait savoir quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées pour arriver à une telle échelle de votre métier ?
Les principales difficultés pour les agents sont relatives à la délivrance de visa et à la limite d’âge des jeunes joueurs et d’ailleurs nous continuons à y faire face. En effet, il devient de plus en plus difficile d’obtenir des visas pour les jeunes talents locaux que nous voulons présenter à l’essai aux différents clubs européens car les garanties de retour du joueur en cas d’essai négatif, sont habituellement considérées comme insuffisantes par les consulats. Il y’a là pour moi un a priori infondé qu’il faut absolument dénoncer. Pour donner une chance à la carrière de ces jeunes aux talents prometteurs, nous sommes obligés de demander aux clubs européens de nous envoyer régulièrement sur place leurs recruteurs attirés. D’autre part, nous sommes également confrontés au problème lié à l’âge de ces jeunes dont la limite pour un débutant est parfois considérée comme dépassée par certains clubs alors même qu’ils sont encore dans toute la force de l’adolescence et sont en capacité de produire d’excellents résultats sur le terrain. Tous ces problèmes engendrent des réunions et négociations intenses mais ne sont naturellement pas de nature à me décourager dans l’exercice de ma profession que je pratique avec beaucoup d’enthousiasme et de fierté.
Quelle est votre particularité dans ce que vous faites étant donné que l’on observe une recrudescence de pseudo managers qui ont pour seul objectif de gagner de l’argent dans le dos des joueurs au détriment de leurs carrières ?
Je dirai que ma première particularité c’est mon éthique et viennent ensuite mon professionnalisme et ma rigueur. Ces trois qualités sont indissociables dans mon quotidien de manager. En ce qui concerne les « pseudo managers », la suppression de la licence d’agent de joueur par la FIFA a contribué à leur prolifération. C’est une situation très déplorable qui nuit gravement aux familles et jette malheureusement le discrédit sur notre digne profession. Il faut absolument trouver les moyens efficaces pour éradiquer définitivement ces escrocs du champ de notre activité. Ceci dit , j’appelle les parents à une grande vigilance et je saisis l’occasion pour interpeller de nouveau ces derniers sur le fait qu’il appartient exclusivement à l’agent détecteur de prendre en charge le jeune talent jusqu’à la signature de son contrat dans un club professionnel. Je demande aussi aux parents de ne plus céder aux pressions de leurs enfants qui sont pressés de voyager sans avoir au préalable et au minimum pris le temps de se renseigner sur la fiabilité de ces personnes qui ne sont que des usurpateurs de titre. Enfin, j’exhorte les enfants à faire preuve d’honnêteté envers leurs familles qui se ruinent quasiment pour réaliser leur rêve de footballeur professionnel en Europe.
Quel est votre regard d’expert sur cette profession (manager) telle qu’elle pratiquée en Afrique ?
Hormis les agents véreux, le métier est très bien implanté en Afrique. En effet, mes collègues font un travail remarquable et plusieurs transferts de joueurs se font régulièrement entre les clubs sur le continent.
Avez-vous des projets dans le domaine en Afrique et/ou ailleurs ? Si oui lesquels ?
Bien sûr. Je travaille en Afrique et en Europe avec différents managers de clubs. Je dirai que dans ce métier nous sommes en permanence entrain de mener des projets car nous sommes constamment à la recherche de jeunes talents partout dans le monde et nous avons plusieurs poulains sous encadrement en Afrique comme en Europe. D’autre part, les échanges avec les clubs sont constants dans la mesure où ces derniers sont en demande permanente de recrutement et intéressés par le résultat de notre travail. Sur le plan des moyens, j’envisage de formuler auprès des différents acteurs du domaine sportif dans notre pays, des propositions relatives à un encadrement réglementaire de notre métier ; ce qui aura pour effet, entre autres, d’éliminer sur le terrain les usurpateurs dont j’ai parlé précédemment.
Quelles sont vos ambitions pour le rayonnement de ce secteur d’activité partout dans le monde ?
Je pense que le rayonnement de la profession au niveau international est une ambition qui ne peut être mieux réalisée qu’au niveau des institutions sportives tant nationales qu’internationales, chacun dans son rôle apportant sa contribution dans ce sens au travers de différents outils. Dans cette perspective et à un niveau individuel, les managers doivent faire preuve de probité et d’éthique dans l’exercice de leur profession. C’est aussi autour de ces valeurs que le management sportif conservera ses lettres de noblesse, suscitera des carrières et rayonnera partout dans le monde.
Vous avez participé à la campagne et défendu avec force la candidature de Samuel Eto‘o à la présidence de la FECAFOOT. Sa victoire on le sait vous a beaucoup réjoui. Comment appréciez-vous la gestion de la fédération sous son magistère et quel bilan faites-vous à ce stade de son administration ?
En effet, sa victoire m’a rendu vraiment très heureux. Pour une fédération de cette envergure et dans notre pays, il est comme on dit, ‘’l’homme de la situation’’. Son parcours brillantissime sur le plan national et international a d’une part légitimé sa candidature et d’autre part fonde sa confiance que la majorité des camerounais lui font aujourd’hui pour réorganiser et gérer convenablement la FECAFOOT. Il est temps de dépoussiérer cette grande institution pour redorer le blason du football camerounais et Samuel accomplit des actions remarquables. En quelques mois il a ‘’ressuscité’’ le championnat élite one et élite two, les conditions de travail des joueurs ainsi que leur situation financière ont été considérablement améliorées et ces derniers en font témoignage publiquement. Je peux encore largement rallonger la liste des changements apportés dans la fédération par le président Eto’o. Force est de constater que son bilan n’est que positif et nul ne peut valablement le contester jusqu’ici. D’ailleurs, ce n’est que le début car d’autres changements tout autant significatifs sont à venir.
Propos recueillis par Tchuisseu Lowé
Nexfrica